Présenter Corpse Party, c’est compliqué dans le sens où très peu de personnes, on pu s’essayer aux premiers titres. A cela s’ajoute le changement de gameplay de chaque épisode : le premier se présente comme un jeu crée sous RPG maker mêlant jeu d’enquête et visual novel, le deuxième se change en visual novel complet et le troisième se laisse aller à la 3D. En tant que joueuse depuis le premier titre, je ne peux que regretter l’absence d’un bundle comprenant les trois jeux, le premier demeurant le meilleur de la série. A travers cet article, je souhaite vous présenter les spécificités de cette saga et pourquoi ce n’est pas qu’un jeu japonais agrémenté de fan service.
Une team Grise
Un Grigri désigne communément une amulette qui protège du mal, cette définition ne semble pourtant pas correspondre à la série de Corpse Party. Dans un premier temps, c’est sous le nom de Kenix Soft que Makoto Kedouin échafaude une première version du jeu en 1996 avec Mao Hamamoto, emblématique compositeur de la série. Après avoir remporté le concours d’ASCII Entertainment software en 1997 avec une version du jeu sur PC-9801 sous TPG Tsukuru 98, première version d’RPG-Maker, il forme un groupe de dôjin, nommé Team Grisgris. Ce premier titre propose sept fins différentes au jeu ainsi que des rangs en fonction de la survie des différents protagonistes : un rang A, trois rangs B, un rang C et deux rangs D. Prévu également pour 1996, un jeu nommé Corpse Party 2 : Satsuki no kokoro est abandonné avec la sortie de la nouvelle version d’RPG maker : RPG Tsukūru Dante 98 II. Le personnage principal se nommait Satsuki Mizuhara, on retrouve ce nom plus tard dans Corpse Party : Hysteric Birthday 2U.
Refais en 2006 pour portables, Corpse Party : a new chapter exclu rapidement tous les aspects RPG du titre afin de ne laisser place qu’à l’horreur mais aussi au chapitrage du jeu. Dans ces premières versions des personnages sont déjà présents : Satoshi Mochida, Naomi Nakashima, Yoshiki Kishinuma, Ayumi Shinozaki, Yuka Mochida et surtout Sachiko. Une version au format épisodique avec un chapitre supplémentaire ressort sur PC sous le nom de Blood Covered de mars 2008 à juillet 2011. D’autres avancements tels qu’une refonte des cartes, des sprites pour les personnages ainsi qu’un doublage amateur. Aux précédentes versions s’ajoutent Seiko Shinohara, Maya Suzumoto, Sakutaro Morishige et Yui Shishido qui complètent le casting final ainsi que d’autres élèves importants comme Yuuya Kizami et Naho Saenoki. De plus, cette édition voit l’apparition des Good Ending, des Wrong Ending et de fins alternatives pour les chapitres 4 et 5 nommé Extra End et Other End. Une version définitive sur PSP sort en 2010, nommée Corpse Party : BloodCovered Repeated Fear avec des illustrations redessinées et un casting professionnel de doubleurs parfois relativement connus qui est conservé dans les futurs jeux. Xseed Games réalise l’adaptation du jeu pour l’occident en anglais. Un portage de la Team GrisGris sur IOS fut réalisé en 2012.
Une histoire d’amitié
Comme toute histoire d’horreur, il faut un groupe d’amis, ou tout du moins un groupe de personnes amené à mourir assez tragique. Même s’ils sont tous personnage principal à un moment de l’histoire, Satoshi se détache du lot. Non pas grâce son chara design d’un classicisme exacerbé, mais parce qu’il s’agit du lien et du porteur du scénario. Pour l’accompagner dans cette tragique aventure, Naomi et Seiko, la première amoureuse du héros et timide, la seconde amoureuse de la première et beaucoup plus extravertie. Ayumi, organisatrice du rituel, descend d’une longue famille de medium et demeure assez fragile tout au long de l’aventure ainsi que la cible préférée des différents esprits. Yoshiki, sorte de bad boy dans l’âme, aura pour mission de protéger sa chère Ayumi. Le professeur d’anglais, Yui Shishido, accompagnera ses élèves et ne sera malheureusement pas d’une grande aide. Les derniers éléments du groupe Moroshige, Yuka et Mayu, apporteront leur lot de surprise dans les différents chapitres. Le déménagement de Mayu crée une certaine émotion au sein de la classe qui décide de fêter l’évènement. Portée par de bons sentiments, Ayumi propose à tout le monde de réaliser le rituel de « Sachiko Everafter », une cérémonie où chacun arrache un bout d’un personnage en papier. Un rituel dont l’effet est de lier chaque participant, les uns aux autres, pour l’éternité. Bien entendu, rien ne se passe comme prévu, et tout le monde se retrouve plongé au sein de la « Heavenly Host Elementary School », une école maudite dont personne n’est jamais revenu.
Ce pitch, à la fois kitsh et étonnant, porte toute l’aventure de ce premier épisode. Perdus dans cette école, joueur et personnage se confrontent aux esprits et autres étudiants perturbé. Et malgré le postulat de départ de certains personnages, leur évolution demeure intéressante. Au groupe de personnages s’ajoute toute une panoplie de pauvres âmes marquantes telles que Naho ou Kizami dont le doubleur n’est autre que Tomokazu –également doubleur de Gintoki dans Gintama ou Chrom dans Fire Emblem Awakening-. Le doublage constitue un des points forts du titre et appuie la narration orientée visual novel. De même, la bande son se compose d’une des plus belle playlist fournie par la PSP avec des morceaux emprunt à la fois de tristesse et d’espoir. Si l’on prend le titre du chapitre 1, les premières secondes dessinent une idée de naïveté et d’insouciance avant d’être rapidement remplacée par une piste plus grave et le morceau alternera entre ces deux nuances.
L’évolution de l’histoire est bien rythmée et chaque chapitre est intéressant. Cependant, il faut réaliser de multiples sauvegardes afin de ne pas se retrouver coincé dans une mauvaise fin. Celles-ci, quand il ne s’agit de simple Game Over, sont bien orchestrées avec des descriptions assez cruelles de ce que l’écran ne s’aurait montrer. Le jeu repose sur un habile mélange d’écriture noire allié à la puissance d’une bande son réussie et accompagné la plupart du temps de CG particulièrement réussies. Certain reprocheront que de mauvaises fins ne tiennent qu’à l’obtention ou non d’un objet à un instant T mais je ne lui en tiens pas rigueur, cette difficulté faisant partie du charme du jeu.
Oui, depuis le début de cet article je n’évoque que les bons côtés du titre mais il ne faut pas se mentir, si le jeu est resté confidentiel, connu que des seuls féru de jeux d’horreurs amoureux du Japon, c’est en grande partie à cause de son gameplay et ses graphismes. Au niveau du gameplay, on se retrouve sur un jeu d’aventure classique où il faut trouver des objets et se rendre dans des endroits précis afin de faire progresser l’histoire. Des antagonistes apparaissent à différent moments du jeu et crée une dynamique de survie où le personnage utilise sa barre de vie qui se révèle ridiculement faible quand il n’est pas tué sur le coup. Certaines énigmes sont particulièrement ardues, comme celle de la poupée chantante indiquant des zones à fouiller. Devant les interactions limitées du joueur face à son environnement, le jeu intègre des phases de choix dont la plupart dissimule une porte vers les mauvaises fins. Le gameplay est surplombé d’une difficulté supplémentaire causée par le peu de point de sauvegarde et l’ajout de situations dangereuses imprévisibles. Wrong End…
En ce qui concerne les graphismes, la première chose que l’on dit sur cette production RPG maker : « c’est moche ». En effet, en plus de posséder une direction artistique assez glauque et dérangeante, les graphismes 2D s’illustre avec une technique assez pauvre pour l’époque. Seule tout ce que n’est pas propre au moteur de jeu, sprites ou CG, se trouvent être d’une grande « beauté ».
Au-delà de la description purement théorique du jeu, l’expérience qu’il crée produit un certain effroi chez le joueur confronté à de nombreuses reprises à des situations malsaines. L’intrigue au départ guillerette devient rapidement beaucoup plus sombre dès que l’on commence à comprendre le destin de l’esprit des lieux, Sachiko, et des autres fantômes. Mais l’histoire ne s’arrêtent pas là, une fois la fin passée arrive le deuxième jeu de la série, Book of Shadow.
Parallèle et suite
Sorti peu de temps après la version PSP du premier titre, Book of Shadow se positionnent d’une étrange manière. Le jeu amène le joueur à revivre des évènements d’une manière différente, comme la mort de certains personnages, et ajoute des chapitres supplémentaires où l’on observe la déchéance de Moroshige ou la suite des évènements du premier opus –dernier chapitre du titre-. La vue first person vient remplacer la vue de dessus du premier et les interactions s’en retrouve plus limitées. Malgré cette limitation, les mauvaises fins surgissent toujours de manière impromptue. Celles-ci se développent autour d’une nouvelle mécanique, la barre de darkness. Une statistique qui augmente tout au long de votre excursion dans le niveau lorsque vous observez des choses étranges ou des corps. Si elle atteint le 100%, c’est le Game Over. Tout comme dans le premier opus, des choix construisent le parcours de votre personnage les différentes fins. Aucun chapitre ne possède de lien avec un autre, ce qui renforce, à tort, l’idée d’un épisode optionnel. Certes, il y a peu d’intérêts à connaître les mésaventures passées au sein de l’école située sur l’ancien site de la Heavenly Host Elementary School –un des meilleur chapitre au demeurant- mais l’ambiance du premier épisode toujours présente participe à l’horreur du titre et amène petit à petit des réponses.
En terme d’avancé de l’histoire, seul un chapitre crée le pont entre Blood Covered et Blood Drive, un chapitre essentiel si l’on ne souhaite pas être perdu par la suite. Le fait de ne pas pouvoir sélectionner le chapitre auquel l’on veut jouer dès le départ demeure assez aberrant et je conseille au joueur de récupérer une sauvegarde afin de jouer aux histoires les plus intéressantes. Les chapitres peuvent être assez disparates dans leur longueur et leur qualité, notamment le cinquième qui peut décourager plus d’un joueur. Le casting de personnages revient une nouvelle fois, la dernière pour certains, avec le même casting de doubleurs. Les sprites et CG sont toujours aussi bien réussie et l’on retient certaine idée de mise en scène liée à la vue FPS notamment un passage où le personnage peut-être capturé par des esprits s’il passe devant une salle précise avec un niveau de darkness important. La bande originale dans son ensemble retranscrit parfaitement l’idée du titre, composées par le même compositeur du premier jeu.
Les fans de la première heure y joueront sûrement mais ils doivent être conscients du passage assumé du jeu vers le visual novel. Cela n’enlève rien mais on peut regretter qu’il n’y ai pas plus de lien entre les chapitres, mais ce détail participe également à la création de fins particulièrement cruelles.
Depuis sa première sortie en Septembre 2011 et sa suite en 2012, Corpse Party possède aujourd’hui une certaine renommée au Japon. Le reboot du jeu que l’on connaît aujourd’hui fut accompagné de produits dérivés, et plus particulièrement d’un manga. Si l’on retrouve l’aspect horrifique du jeu, on regrette que le partie pris soit tourné vers un fan service déplacé omni-présent. S’il se faisait oublié dans le jeu, dans le manga les plans suggestifs se succèdent…
Dans le genre fan service, un autre jeu troublant sorti peu de temps après en 2012, Corpse Party the Anthology: Sachiko no Ren’ai Yūgi ♥ Hysteric Birthday 2U (コープスパーティー -THE ANTHOLOGY- サチコの恋愛遊戯♥Hysteric Birthday 2U (ou Corpse Party the Anthology: Sachiko’s Game of Love ♥ Hysteric Birthday 2U). Dans ce jeu, vous jouez le groupe d’étudiant encore au complet, rassemblé pour fêter l’anniversaire de notre fantôme préféré, Sachiko. Le jeu enchaîne les situations cocasses, aux fins parfois tragiques : création d’une pièce de théâtre, jeu meurtrier de Sachiko, concours de cuisine… Comme tous jeux de fan service affiché, tentacules et costume de maid font leur entrés dans ce titre. L’intérêt limité de cet opus, voir inexistant, en font, à juste titre, un épisode inconnu du public occidental.
La sortie du dernier volet de Corpse Party : Blood Drive s’accompagne de l’adaptation en anime du premier jeu de la série. Dans un premier temps, seul un prologue est diffusé dans la version collector de Sachiko’s Game of Love ♥ Hysteric Birthday 2U, suivi rapidement de quatre épisodes, bien peu pour couvrir l’ensemble du jeu. Surtout quand le prologue n’a de Corpse Party que ses deux premières minutes, le reste de l’épisode de 15 minutes se composant d’une suite de scènes fan service. Heureusement, la fin de l’épisode annonce une suite prometteuse avec des épisodes d’une longueur d’environs 40 minutes. L’anime suit la trame du jeu pendant presque deux épisodes, juste le temps de voir la fin du chapitre 1 du jeu. On comprend à ce moment là qu’il sera impossible retranscrire la dimension de l’œuvre originale. De plus, ceux qui auront joué au deux premiers jeux remarqueront certaines incohérences, dont la fin ou le passage ou Yuuka se retrouve en danger. La variante n’en demeure pas moins agréable, il est cependant dommage d’avoir une histoire qui ne respecte pas la trame du premier. L’ensemble s’accompagne d’une technique et une bande son réussies. S’il peut décevoir les fans les plus pointus, cela reste une bonne porte d’entrée dans la série ou même pour mieux visualiser l’Heavenly Host Elementary School et son univers.
A cette adaptation s’ajoute celle des films dont le second présente une date de sortie pour 2016. Rigide, cadrage hasardeux, les défauts techniques propres à ce genre de cinéma se font sentir et l’on devient plus spectateur d’une sorte de parodie. Je ne peux malheureusement pas vous le conseiller, à moins que revenir une dernière fois dans la Heavenly Host School ne vous tente.
Je fini cette article avec un nouveau Corpse Party nommé Corpse Party 2 : Dead Patient. Développé par Grindhouse, une équipe de dôjin composé de personne en lien avec la Team Grisgris, l’histoire prend place dans un hôpital délabré où l’on dirige une patiente. Sorti le 29 mai 2013, on ne peut que constater que son format PC entraîne beaucoup moins de déconvenues que dans l’épisode final de la série sorti sur PSVita en octobre 2015 chez nous. On incarne une des patiente de l’hôpital qui a son réveil se retrouve seule, coincée dans sa chambre. Amnésique, elle doit trouver un moyen de se frayer un chemin au sein du bâtiment en ruine. Le jeu au format épisodique, semble être ce qui se rapproche le plus de l’expérience initial tout en adoptant un style 3D comme le fait Blood Drive. Découpé en chapitre, seul le premier est actuellement disponible au Japon.
Avant de conclure cet article voici mes conseils pour ceux qui voudraient se lancer dans la magnifique aventure de Corpse Party. Si vous avez le temps, faire le premier jeu reste encore aujourd’hui une expérience agréable et surprenante. A ce moment là, le deuxième opus n’est plus aussi essentiel depuis la sortie de Blood Drive mais il reste sympathique à condition de sauter les chapitres 3, 5 (surtout celui-là) et le 7. Pour des joueurs au temps plus limité en temps, il reste l’animé à condition de faire Book of Shadow –avec la même sélection de chapitre- ainsi que de prendre des renseignements sur la vraie fin. Avec ces bonnes bases, cela devrait être suffisant pour attaquer le dernier titre de la trilogie comme il se doit. Troisième titre que je traiterai sous un nouveau format de podcast sous peu, toujours sur JeuDePixel !