Dans mon dernier Memory Shot, je vous parlais déjà d’une des grandes licences de Konami. Ce mois-ci j’ai donc décidé de revenir sur un épisode décrié qui divise les fans : Castlevania Lords of Shadow. Ce Castlevania se dessine comme un reboot, une relecture de l’univers ainsi que de son gamepay. On retrouve Gabriel Belmont tiraillé entre sa quête de sauver le monde mais également son désir de vengeance. Tout le cheminement du jeu ramène à cette idée du personnage tragique partagé entre passion et devoir. Mais le jeu se distingue surtout par son ambiance et sa direction artistique avec un gameplay taillé sur celui de God of War. Il me fut difficile de choisir des passages du jeu tant la mise en scène est réussie. Pour ceux qui découvre cette chronique dévoile des passages important de l’intrigue et je conseille donc à ceux qui veulent faire le jeu de ne pas poursuivre.
Trailer E3 2010
Je ne vais pas analyser ce trailer mais je souhaitais que ceux qui ont fait le jeu puisse le revoir afin de constater à quel point celui-ci nous a menti sur sa « trame » de fond : l’attente de Dracula, sauver le monde, l’espoir…
Ce trailer est également intéressant dans sa construction, présence de la voie off du narrateur « in game », dialogue de personnages se répondant, présence du nom des doubleurs/acteurs, musique épique: on est clairement face à une mise en valeur cinématographique. Par ailleurs il serait difficile de ne pas voir que MercurySteam Entertainment s’est grandement inspiré de l’oeuvre de Guillermo del Toro, notamment du film « Le labyrinthe de Pan ». Dans cette optique, le jeu dispose d’une caméra fixe utilisée pour magnifier les plans et d’un bestiaire à la fois fascinant et dangereux. Alors que la série des Castlevania demeurait une relecture d’un studio japonais des mythes européens, ici, c’est l’inverse. MercurySteam tente de relire le jeu japonais Castlevania avec une interprétation européenne aussi bien au niveau de la mise en scène que culturellement parlant. Il devient donc logique que l’aspect « Metroidvania » soit le grand absent de cette épisode. Il laisse place au beat them all/jeu d’action plus à même de produire les plans nécessaires à la narration de l’histoire.
On remarque une fois de plus l’impact que fut Shadow of Colessus de Fumito Ueda à travers les différents boss mais également avec la sensation de solitude dans laquelle se retrouve Gabriel, étranger au monde dans lequel il voyage.
La boîte à musique
De mon point de vue, il s’agit là du meilleur niveau de ce Castlevania aussi bien en terme de symbolique que de gameplay. Le joueur doit accomplir la tâche que Baba, une vieille sorcière, lui a « confié ». Miniaturisé, puis disposé dans cette boîte à musique, il s’en suit un long tâtonnement afin de trouver le bon ordre des différents tubes de l’orgue de barbarie et reconstituer le chemin à suivre. La boîte met à l’épreuve le joueur en l’opposant à différent pièges qui s’activent en fonction de l’ordre des tubes. Rapidité, minutie, il s’agit là d’un véritable niveau de plate-forme et de rapidité. Il faudra également un certain temps afin que le joueur détermine le bon ordre dans lequel les couleurs doivent être alignées. De plus, certains bonus dissiminés ici et là obligeront le joueur à changer l’agencement des tubes et faire preuves d’encore plus de dextérité afin de les retrouver.
En ce qui concerne la symbolique, on est dans une boîte à musique. Inexorablement, cela fait appelle à la nostalgie qui est un des thèmes de cette quête : baba veut récupérer une certaine rose bleue qui lui permettrait de redevenir jeune. Hormis cet aspect, la boîte offre au joueur la vue sur une multitude d’engrenages s’enclenchant en fonction de ses actions. N’est-ce pas indirectement lui rappeler que le jeu vidéo avant d’être une œuvre visuelle demeure avant tout un ensemble de mécanique ? Le die and retry du niveau est conséquent, ce n’est qu’en testant que l’on découvre le chemin vers la fameuse rose bleue.
Par ailleurs, la rose bleue représente dans la littérature l’atteinte de l’impossible, la patience et l’espoir éternel. Ces mots représentent le parcours de Gabriel depuis le début du jeu, surtout que l’on se doute déjà de la triste fin de ce voyage à niveau de l’intrigue. On peut aussi noter que cette fleur est présente dans le célèbre conte russe « Baba Yaga » où une femme âgée réalise les vœux de ceux qui lui remette une rose bleue. Le niveau est représenté de manière baroque avec des engrenages dorées et une architecture tranchent radicalement avec le précédent niveau poussiéreux et délaissé. Tel un oasis, cette boîte représente aussi bien pour Baba que Gabriel, l’espoir illusoir d’un meilleur avenir.
Et qu’en est-il de la musique joué par cette boîte ? Le joueur averti aura reconnu le célèbre thème de la saga « Vampire Killer ». La musique du niveau est entièrement intradiégétique, aussi bien les sarcasmes de Baba que les bruits des différents instruments de torture présents.
La fin
Le jeu a également beaucoup fait parler de lui pour sa fin, jusqu’à cet instant, nous n’avons jamais rencontré Dracula. A l’apparition du générique, on peut penser qu’il y a affectivement erreur sur la marchandise. C’était avant la dernière scène où l’on découvre Zobek se rendant au chevet de Dracula qu’il appelle Gabriel. Dans cette fin, les plans de camera tout comme les jeux de lumières sont essentiels. Pendant 2:40, on suit Zobek qui se retrouve face à une immense rosace irradiant son visage de lumière. Son identité enfin dévoilée, il retire sa capuche et s’adresse à une personne toujours hors-cadre à cause d’une caméra positionner à l’endroit de l’interlocuteur. Ce n’est qu’à plus de trois minutes de vidéo que le nom de Gabriel est lancé. Celui-ci réagit avec colère et clame n’être plus que Dracula.
A ce moment là un éclair illumine le personnage faisant apparaître en fondu l’ancien Gabriel comme pour certifié son identité. Toute cette mise en scène crée une attente chez le joueur donc forcément un choc ou une frustration au moment de la révélation. Second choc, lorsque Gabriel attaque Zobek puis se fait projetter hors de l’église: le joueur découvre un monde comtemporain au notre.
Dans cette séquence, le personnage de Gabriel est à la fois magnifié et détruit à travers les lumières jouant sur le dévoilé/caché ainsi qui que les plans de caméra lui donnant à la fois de l’envergure lorsqu’il est assis sur son trône et inspirant de la pitié lorsqu’il en chute. Maudit/bénit, on a ici l’image du vampire tel qu’il se retranscrit à travers les livres de Anne Rice mais également une grande partie des romans occidentaux. Certains ont critiqué ce retournement de situation, mais en réalité il poursuit la relecture établit par le studio. Si l’on se base sur le roman de Bram Stocker, Dracula devient ce qu’il après avoir rejeter Dieu suite à la mort tragique de sa bien aimée en partie causée par sa faute. Cette idée est totalement retranscrite dans ce Castlevania : Lords of Shadow.
D’un certain point de vue, je trouve cela dommage que le jeu se soit arrêter après cette séquence. Je pense même que le temps décrié Castlevania : Lords of Shadow 2 aurait dû débuter directement, un peu comme si le jeu nous avait fait une « fausse fin ». Mais c’est un autre sujet.
A partir de 21:19 sur la vidéo:
Je relis tout ça calmement et j’essaie tranquillement une critique construite du pourquoi du comment de mon désamour de ce jeu, alors même que je suis un fanboy purulent de la saga (j’ai même survécu aux épisodes N64…)
C’est pour moi un épisode qui ne m’a jamais attiré, je le ferai peut être un de ces jours mais j’ai trop peur d’être déçu tellement j’aime les épisodes 2D qui ont fait la renommée de la saga…